Mes chères contrariées, mes chers contrariens !
Il y a deux sujets majeurs aujourd’hui qui dominent l’actualité. Le premier c’est bien entendu Chypre et le fameux plan de sauvetage qui, je vous l’annonce, ne sera comme pour la Grèce que le premier d’une longue liste. Mais nous y reviendrons plus loin.
Le deuxième sujet est purement franco-français et c’est le résultat de l’élection législative qui vient de se tenir dans l’Oise. Au premier abord beaucoup risquent de penser que je vais m’éloigner de notre ligne éditoriale qui consiste à décrypter l’économie de façon contrarienne. C’est en partie vrai. Mais à ma décharge en partie seulement car ce sujet va nous ramener en réalité au cœur des conséquences politiques de la crise économique.
Je tenterai d’aborder ce sujet de la façon la plus neutre possible.
Les résultats de cette élection ne sont pas un avertissement mais la matérialisation d’une fracture béante qui vient de s’ouvrir !
Qu’entend-on actuellement dans les médias ? Qu’il faut faire « marcher » le front républicain, on se pose la question de savoir si le cordon sanitaire posé autours du FN fonctionne toujours ? On s’interroge doctement sur l’avertissement que viennent d’adresser les électeurs et autres crétineries du même acabit permettant de ne pas traiter les vrais sujets.
Alors quels sont les vrais sujets ? Les vrais sujets sont ceux sur lesquels les français (au sens électeur et ceux qui ont le droit de vote) vont se focaliser pour exprimer leur vote.
Il y a le fonds de commerce traditionnel du FN avec l’immigration, la délinquance, l’islamisation (IDI) etc… Ok. Cela tout le monde l’avait compris et ça va représenter 10% à 20% grand maximum des suffrages (pour le moment).
Ensuite il y a l’économie. Et c’est un thème parfaitement nouveau. Le FN avec le Front de Gauche de Mélenchon sont les seuls partis à proposer une alternative avec sortie de l’euro. Le problème étant que Mélenchon nie totalement les problèmes pourtant rééls de l’IDI. Donc Mélenchon ne perce pas (on se demande encore pourquoi) et Marine Le Pen perce (on se demande encore pourquoi…).
Enfin et c’est le dernier élément, l’obstination de l’équipe du Président de la République à faire passer le mariage pour tous alors qu’une forte partie de la population y est très fortement opposée (que ce soit chez nos concitoyens catholiques, musulmans ou de confession juive) sans concertation aucune et pour faire plaisir à une minorité (les homosexuels) n’a rien arrangé. Rajoutez à cela une diabolisation de tous les opposants immédiatement qualifiés d’homophobes et vous obtenez une adhésion plus forte aux thèses frontistes.
C’est l’institution de la famille qui est attaquée dans ses fondements. Mais ce n’est pas tout. Les classes moyennes (à partir de 2000 euros de revenus par mois) se font massacrer au profit des plus pauvres qui, pour beaucoup de payeurs, ne sont plus vus que comme des assistés…
Sans oublier toujours la famille une baisse programmée des allocations familiales qui vont perdre leur côté universel.
Au bout du compte et moins d’un an après son élection le Président François Hollande a réussi à cliver la société française de façon bien plus forte que le Président précédent ce qui est assez surprenant. D’une part sur les aspects sociétaux et notamment la famille mais surtout parce que désormais la gauche n’est plus porteuse d’espoirs (que la droite n’incarne pas non plus). C’est le clivage involontaire par la désespérance.
Ce clivage est en gros entre ceux qui travaillent et paient des impôts en ayant une vision assez traditionnelle des choses (ce qui est respectable) et les assistés qui reçoivent…
Mettez tous ces éléments dans un bocal, secouez, et vous obtenez une situation politique explosive, un mécontentement très fort et la tentation après l’UMP en échec et le PS en échec d’essayer d’autres solutions. Cela n’est pas surprenant c’est une évidence. La France danse sur un volcan social attisé par des problèmes inter-ethniques, religieux, sur lesquels soufflent le mariage pour tous et la baisse des allocations familiales qui jusqu’à présent… justement étaient pour tous…
Lorsque le FN fait un score de 49% dans un département de gauche, et dans une commune de gauche, le gouvernement de gauche doit comprendre qu’il vient de perdre définitivement les classes moyennes. Le gouvernement vient de perdre la France. Il ne lui aura fallu que 10 mois pour obtenir ce résultat catastrophique.
Rajoutez les difficultés économiques qui se profilent avec le budget 2014 pour lequel il faudra trouver 80 milliards d’euros d’économies ou de rentrées supplémentaires et d’ici 12 à 24 mois une crise politique terrible secouera notre pays sans doute au moment des élections municipales qui vont voir un déferlement du Front National. Alors on pourra continuer à s’étonner et se dire que l’important c’est d’expliquer aux gens etc… mais les gens ont compris qu’aucun changement majeur ne pourra être porté par les partis traditionnels. C’est ce que la bien pensance appelle la montée des populismes. Nous y sommes et je vous renvoie à mon Edito intitulé « Le cauchemar ».
Pour le Front de Gauche, cela mérite que l’on s’y arrête également quelques instants.
Il y a eu cette législative partielle au résultat frappant, mais ce n’est pas tout. Il y a aussi la polémique Mélenchon.
Le discours du leader du Front de gauche se « radicalise » comme le dit la grande presse. Les « 17 salopards » de l’Eurogroupe, ce qui n’est pas tout à fait faux disons-le, et surtout, surtout, le fait que Mélenchon dise que Moscovici sert les intérêts de la finance internationale et pas ceux de la France.
Résultat ? Par un renversement de rôles hallucinant Mélenchon le gauchiste se trouve affublé des mêmes accusations que le Front National. Mélenchon est donc devenu subitement antisémite. Surprenant.
Tellement surprenant que je n’y crois pas un seul instant. Ma femme va me dire que je n’ai pas de preuve (ce qui est vrai) et que mon esprit est trop chagrin… mais c’est comme ça !
Monsieur Mélenchon et le Front de gauche sont en réalité les seuls contre-feux disponibles pour essayer de sauver un Parti Socialiste à la dérive. Le Front de gauche a pour mission de ramener au bercail les brebis de gauche égarées en « lepénie » et il est symptomatique de revoir Mélenchon apparaître sur les écrans médiatiques au moment même d’une percée incroyable du Front National. Et pour relancer Mélenchon, rien ne vaut un petit coup de diabolisation intellectuellement tellement injuste que ces accusations d’antisémitisme sont aussi judicieuses que celles d’homophobie pour les manifestants opposés au mariage pour tous.
Mais avec cela Mélenchon revient au coeur du « jeu » médiatique. C’est l’essentiel.
Le problème qui apparaît donc cruellement est que le PS n’a pour politique que l’allumage de contre-feux et des stratégies de diversion. Mais cela ne constitue en aucun cas de la Politique. Cela relève du calcul et de la gestion à la petite semaine d’enjeux majeurs.
Le PS porte aujourd’hui, parce qu’il est aux affaires, la responsabilité de faire des choix politiques forts pour sauver la démocratie française et les grands partis dits de gouvernement. Cette crise politique qui s’annonce ne profitera pas à l’UMP et la droite traditionnelle devrait se méfier d’une mauvaise appréciation de la situation.
Le PS se trompe lorsqu’il pense que le Front de Gauche sera une alternative pour les électeurs du Front National qui aujourd’hui sont autant issus de la droite que … de la gauche.
Le PS et le Président François Hollande, devront avoir le courage de sortir notre pays de l’ornière en le sortant du carcan de la monnaie unique pour que la France retrouve des marges de manœuvre.
En s’enfermant dans l’austérité germanique, François Hollande permet l’émergence du Front National… et cela ne profite plus à la gauche, car les clivages traditionnels viennent de voler en éclat.
Revenons à Chypre.
L’accord autour de Chypre, un changement de stratégie majeur pour l’Europe !
Un nouvel accord a été trouvé par les responsables de l’Union européenne autour des problèmes de l’île de Chypre.
Ce nouvel accord marque un grand changement de stratégie de la part des gouvernements de l’eurozone.
Les banques peuvent faire faillite et cela sauve l’état !
Pour la première fois depuis le début de la crise et nous aurions dû commencer par-là, nous laissons des banques faire faillite et c’est une excellente nouvelle pour les états. C’est une moins bonne nouvelle pour les épargnants qui évidemment sont appelés à subir des pertes importantes sur leurs économies qui se volatilisent dans le trou noir de la finance.
Mais oui et cent fois oui, il faut laisser tomber les banques car cela coûte beaucoup moins cher de garantir les dépôts que de garantir tout le bilan d’une banque ce qui est une évidence.
Les conséquences concrètes pour les habitants du laboratoire chypriote
Alors que va-t-il se passer à Chypre ? Les dépôts des gens seront garantis à hauteur de 100 000 euros comme s’y était engagée l’Europe et cela aussi est une bonne nouvelle pour les moins riches des européens qui conservent en partie l’illusion que leurs petites économies pourraient être protégées.
Au-delà de 100 000 euros de dépôts et en fonction de la gravité de la situation de la banque dans laquelle vous aviez vos fonds, vous pouvez perdre jusqu’à 40% de vos avoirs. C’est donc la ruine des clients.
Certes. Retenez bien cela, avant de ruiner les clients et c’est pour cela qu’il va leur rester environ 50 à 60% de leurs dépôts, on ruine d’abord les porteurs d’obligations (ceux qui ont prêté à la banque), puis les actionnaires (ceux qui ont encaissé sans rien faire pendant des années des dividendes). Tout cela est parfaitement dans l’esprit de la responsabilisation du capitalisme. On joue on gagne et des fois on perd et quand on perd,… on perd vraiment.
Pour la première fois nous ne privatisons plus les bénéfices et ne socialisons plus les pertes. Et c’est un changement majeur de stratégie qui fera « jurisprudence » dans les cas qui ne manqueront pas de se poser au Portugal, en Espagne ou encore en Italie (sans même oser vous parler de la France qui ne risque jamais rien).
Chypre démantèle son système bancaire tout en évitant une faillite désordonnée et en préservant l’état chypriote d’une faillite qu’aurait occasionné son soutien au secteur bancaire surdimensionné.
Concrètement, Chypre va imposer un contrôle des capitaux. Il faut comprendre par-là que vous ne pourrez pas disposer de vos fonds, pour une durée indéterminée. C’est ce que les argentins avaient surnommé les « corralito ». Et oui vos avoirs sont parqués, gelés, en général jusqu’à ce que vous n’ayez plus rien ou presque…
Quelles conclusions ?
Il faut donc tirer les bonnes conclusions de cette histoire chypriote pour protéger votre patrimoine.
Désormais vous devez savoir que les banques peuvent faire faillite. Non, soyons plus clair. Vous savez que des banques vont faire faillite. Vous savez que les états ne sont plus en mesure d’intervenir pour sauver des systèmes bancaires devenus obèses. Vous voyez que le problème chypriote trouve une résolution essentiellement chypriote ce qui veut dire que l’Espagne ou l’Italie deux pays beaucoup trop gros pour être sauvés par les autres pays européens, devront se débrouiller seuls.
Alors regardez bien ce qu’il se passe à Chypre car cela aura bientôt lieu en Espagne, en Italie en Belgique ou en France. La bonne question est donc que faire de son argent ? La réponse est assez simple. En avoir le moins possible à la banque et pour cela l’or comme l’argent restent des alternatives extraordinaires au système bancaire traditionnel.
C’est également le cas pour les actifs tangibles qui eux ne s’envolent pas en fumée lorsque les banques s’effondrent. Terres agricoles, forêts, ou même bouteilles de vin qui au moins pourront vous réconforter lors d’un bon repas (si vous pouvez encore acheter à manger).
Pour ceux qui considèrent qu’ils n’ont pas assez d’argent pour faire tout cela… dépensez, dépensez tout, partez en voyage, faites-vous plaisir… au moins vous aurez passé un bon moment, changez votre canapé ou votre voiture (vous ferez tourner l’économie et vous serez de bons citoyens).
Sinon vous pouvez toujours croire que tout va bien… mais ce n’est pas le cas !
Débancarisez… voilà le mot d’ordre de l’année 2013… pour préparer 2014.
Au fait vous savez ce que c’est qu’un dépôt bancaire ?
Evidemment ! Pfff ! C’est les sous qui m’appartiennent et que je dépose à la banque.
Et bien non, pas du tout. Enfin pas tout à fait. Disons que vous, vous croyez que ce sont vos sous. Mais la réalité c’est qu’une fois que vous venez de les déposer ce n’est plus du tout vos sous… et en plus c’est la loi.
Car un dépôt bancaire c’est en réalité une créance sur la banque. Comptablement et juridiquement la banque vous doit cet argent. A ce titre cela devient une créance. Lorsque le créancier n’est plus solvable, il ne peut pas y avoir de recouvrement de la créance.
Pour ceux qui n’auraient pas compris, cela veut dire que la banque dans ce cas ne vous redonne pas votre dépôt. Votre argent est parti en fumée et vous êtes ruiné. Contrairement à ce que l’on croit, un compte bancaire n’est pas un lieu de stockage de valeur. Ne l’oubliez jamais.
Charles SANNAT