BEIJING, 27 février – Dongfeng Motor Corporation Co., l’un des plus grands constructeurs automobiles chinois, a signé mardi 18 février avec PSA Peugeot-Citroën un protocole d’accord pour devenir l’un des principaux actionnaires de ce dernier pour la somme de 800 millions d’euros.
Dongfeng Motor et PSA ont convenu de renforcer leur coopération en matière de technologies, de recherche et développement, de fabrication et de distribution à l’étranger. On estime que cette coopération changera le visage de PSA et pourrait permettre au groupe de s’imposer sur le marché international hors Europe et surtout en Asie et de sortir de sa crise financière.
Mais en Chine, les avis sur ce qui constitue le plus gros investissement de l’industrie automobile chinoise à étranger sont partagés.
D’après les optimistes, cet accord, qui devrait être officiellement signé en mars, permettra de sortir PSA de l’ornière financière. Et de l’autre côté, Dongfeng Motor a besoin de cette opportunité pour acquérir et développer des technologies et élargir ses débouchés en Europe.
En fait cet accord a surtout été encouragé par les autorités gouvernementales des deux côtés. Dans une conférence de presse lundi à Beijing, le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a mentionné que cette coopération était un grand pas pour renforcer le partenariat industriel entre les deux pays.
La coopération entre Dongfeng Motor et PSA sera-t-elle une coopération gagnant-gagnant ? Certaines institutions et des analystes chinois restent plutôt neutres ou peu optimistes.
Leur première inquiétude concerne le pouvoir de décision de Dongfeng au sein de PSA dans l’avenir. En tant que l’un des trois principaux actionnaires, Dongfeng détient 14 % des parts de cette entreprise française, les deux autres grands actionnaires étant le gouvernement français et la famille Peugeot. Les trois parties ont apporté chacune 800 millions d’euros au capital de l’entreprise, et PSA a utilisé des recettes issues de la vente de ses propriétés pour arriver à un financement total de 3 milliards d’euros.
Mais selon une source proche des négociations entre les deux groupes, d’après le mémorandum d’entente qu’ont signé les trois parties, aucune d’entre elles ne pourra augmenter ses parts pendant dix ans. Les deux autres grands actionnaires étant de nationalité française, il est peu probable que Dongfeng puisse acquérir plus de pouvoir dans la recherche et le développement au sein de PSA dans l’avenir.
Dans le même mémorandum, il est précisé que 75 % de la recherche technologique de PSA et que la production d’1 million de voitures devront rester en France, ce qui fait craindre que le futur centre de recherche de PSA en Chine ne reste qu’une « coquille vide ».
La crise financière que PSA a subi constitue un autre facteur motivant les avis pessimistes. PSA a connu de lourdes pertes financières au cours des deux dernières années, avec 2,32 milliards d’euros de pertes en 2013 et 5,01 milliards de pertes en 2012. L’entrée de Dongfeng Motor devrait permettre à l’entreprise d’étendre son accès au marché automobile asiatique et de sortir de ses difficultés du moment.
Mais d’après certains analystes, cette « mission de sauvetage » d’une entreprise automobile si grande ne sera pas facile, car si le volume des ventes et le prix de revient de PSA ne sont pas satisfaisants, alors les 3 milliards d’euros de financement ne dureront que trois trimestres. De plus, depuis longtemps le marché automobile asiatique est principalement occupé par les voitures japonaises, on ne peut donc prédire quel sera le succès de la stratégie de PSA et de Dongfeng pour augmenter leurs parts sur le marché de l’Asie du sud-est.
En plus, malgré l’aide apportée par les capitaux injectés par Dongfeng Motor en vue d’apaiser les pressions financières de PSA, les problèmes essentiels ne seront pas résolus : le marché européen reste toujours atone et le manque de réactivité de la famille Peugeot face à la concurrence doit encore être amélioré, selon un reportage du Wall Street Journal.
L’une des importantes initiatives de Dongfeng Motor est de profiter des transferts de technologies et de l’établissement d’un centre de recherche et d’une joint-venture en Chine. Zhu Fushou, PDG et président du conseil de Dongfeng a indiqué récemment qu’il ne s’agissait pas seulement d’un investissement en capital, mais plutôt d’une coopération tous azimuts dans la recherche et la production, et que cela permettrait à Dongfeng et PSA de renforcer leur compétitivité internationale.
Selon un reportage publié sur un site Internet financier chinois, les entreprises chinoises n’ont jamais pu avoir une série complète de technologies de construction automobile dans leurs précédents achats. Il est de plus évident que la France ne souhaite pas la divulgation de ses technologies de pointe.
Mais dans cet article, on conseille à Dongfeng d’insister pour prendre en charge toutes les affaires de PSA en Asie. Dans ce cas, PSA consentira sûrement à introduire ses meilleurs produits et technologies en Chine, et les deux côtés pourront réaliser et partager une plate-forme et leurs technologies automobiles.
Dans cette coopération internationale, on voit plutôt un échange commercial.
Quels bénéfices Dongfeng va-t-il en tirer ? S’agira-t-il d’une coopération gagnant-gagnant ? Il va falloir attendre pour voir ce qui s’ensuivra, a conclu un analyste.
Agence de Presse Xinhua