Dévaluation monétaire
Le 25 janvier prochain ont lieu les prochaines élections législatives en Grèce et le parti de gauche anti-austérité Syriza maintient son avance de 3,5 % sur les conservateurs au pouvoir, ce qui ne plaît pas du tout aux marchés, ni au FMI. Au moment même où l’on parle d’unité(s) nationale(s) après les attentats du 7 janvier, un « Grexit » ferait plutôt mauvais effet…
L’annonce du QE décidé par la BCE ce mercredi 21 janvier et la dévaluation de l’euro, la décision de la Banque nationale suisse d’abandonner le plancher du franc suisse, la probable victoire de l’extrême gauche en Grèce et ses implications… Tous ces facteurs (ré)suscitent la peur du risque et font que l’or apparaît plus que jamais comme la valeur refuge qu’il a toujours été.
Un bref point sur l’Europe
Alors que la Lituanie vient de rejoindre les bancs de la zone euro, la sortie de la Grèce de la monnaie commune européenne ne serait plus taboue aux yeux d’Angela Merkel.
Début janvier, LlAllemagne trouvait « supportable » ce scénario, si le parti de gauche radicale Syriza l’emportait aux législatives partielles de ce dimanche 25 janvier. « Que la Grèce quitte la zone euro, si elle le souhaite… », déclarait la chancelière allemande dans le quotidien Der Spiegel.
Selon le président du Parlement européen, Martin Schulz, qui qualifiait ces considérations « d’irresponsables », « il n’est pas question d’une sortie de l’euro. Les conseils non sollicités qui donnent aux gens en Grèce le sentiment que ce n’est pas eux qui décident par leur vote de leur avenir mais Bruxelles ou Berlin, poussent peut-être même les électeurs dans les bras des forces radicales » (source France 24).
Plus qu’un sentiment anti-européen, l’ampleur que prend la gauche radicale en Grèce pointe du doigt un dysfonctionnement européen, une monnaie bancale qui fonctionne bon gré mal gré avec des économies hétérogènes, un assujettissement à la dette, aux banques centrales et bien sûr à l’Allemagne, qui ne veut semble-t-il plus jouer à l’austérité avec son camarade hellène (et vice-versa).
Le vœu du parti anti-austérité Syriza ? « En finir avec la politique d’austérité imposée au pays par ses créanciers internationaux (la troïka UE, BCE et FMI) en échange de quelque 240 milliards d’euros de prêts » (source L’Express). Alexis Tsipras, leader du parti Syriza, souhaite aussi restructuration de la dette publique.
La montée de Syriza dérange au point que 100 000 jeunes (pour qui les intentions de vote vont plus vers le parti anti-austérité) auraient été « oubliés » des listes électorales…
Que représenterait l’obtention de la majorité de l’extrême gauche en Grèce ? Dans son édito du 20 janvier, Charles Sannat analyse la situation.
Déjà, ce serait une première dans l’histoire de la Grèce. Et le parti anti-austérité « aurait les coudées franches pour pouvoir renégocier en position de force avec les créanciers de la Grèce ».
La Grèce ne paiera sans doute jamais sa dette comme les Grecs ne paient déjà plus leurs impôts.
Syriza promet des mesures d’allègement fiscal. En attendant le résultat des élections et si les promesses vont être tenues si le parti de gauche radicale passe, les Grecs ont choisi de « différer » le paiement de leurs impôts, dont le paiement est intenable.
Si le pays sortait de la zone euro, il pourrait bien se retrouver avec une dévaluation monétaire de l’ordre de 60 %. Les Grecs vont à tout prix chercher à se « prémunir en changeant déjà de monnaie : cela veut dire par exemple acheter du franc suisse ou du dollar, changer de banque, aller vers une banque dans un pays étranger et enfin acheter de l’or ou de l’argent métal… ».
L’Europe rattrapée par le principe de réalité
La semaine dernière, LesEchos.be titraient « Zone euro : ne parlons pas encore de déflation, mais… ».
Autant dire que nous y sommes déjà… « En zone euro, les prix ont baissé de 0,2 % (sur un an) en décembre, selon une première estimation de l’office européen de statistiques Eurostat », indiquaient Les Échos.
« Il s’agit de la première baisse des prix dans la zone euro depuis octobre 2009 (-0,1 %). Si elle se prolonge, la zone euro entrera dans une période de déflation ».
Et l’or dans tout ça ?
Déjà, on peut dire que l’or se comporte généralement bien en période de récession. Il n’y a qu’à voir de quelle façon l’or performe en yen (le Japon est en récession depuis des années) ou encore mieux, en roubles, devises dans laquelle l’appréciation de l’or a dépassé les 77 % en 2014, pour se rendre compte de la très bonne tenue de route de l’or en de telles périodes.
En outre, toutes ces difficultés rencontrées au sein de la zone euro contribuent au repli stratégique des investisseurs dans des valeurs refuge comme l’or et donc à une montée des prix. Ce n’est pas par hasard si le cours de l’or est en hausse depuis le début de l’année. Comme le titrait le site d’analyse Dailyforex le 07 janvier dernier, « L’or grimpe avec les difficultés de la zone euro », la crise politique grecque et un recul des actions dans le monde ayant renforcé l’attrait du métal précieux sécuritaire.
Les Échos le soulignaient également dans leur édition du 06 janvier, « Face au risque grec, l’or redevient une valeur refuge ».
Et depuis la rédaction de cet article, de l’eau a coulé sous les ponts et du sang dans les rues et les rédactions. Depuis le 1er janvier, le cours de l’once s’est envolé de 979 € à 1 145,18 € ce vendredi 23 janvier, un niveau qui n’avait pas été atteint depuis fin juillet 2011, avant une envolée historique des cours de l’or (cotation AuCOFFRE.com).
Sans oublier l’incidence du franc suisse…
Comme l’indique Romandie, « L’or au plus haut en quatre mois après la tempête de la BNS ». Le plancher du franc suisse étant abandonné, « cela s’est traduit par un accroissement de l’appétit pour les valeurs refuges et a été par conséquent un facteur positif net pour l’or », ont souligné les analystes de la banque suisse UBS. L’or a retrouvé son statut de valeur refuge.
Le cours de l’or dopé par la BNS, la BCE et la Grèce
C’est encore un article du journal suisse Romandie qui l’annonçait ce 19 janvier.
Comme le soulignait Christophe Vereecke, conseiller analyste chez AuCOFFRE.com dans l’interview qu’il nous a accordée la semaine dernière, d’après un schéma de la performance de l’or sur 10 ans, on constate que l’or réintègre le canal long terme et qu’il vient de finir la consolidation de moyen terme. Les perspectives sont donc haussières à court et à long terme.
Que vont changer les annonces de la BCE ?
Les retombées positives de cette injection indirecte de liquidité (par rachat par la BCE des dettes souveraines des pays membres de la zone euro) ne seront ni obligatoires, ni immédiates pour l’économie, mais cela va insuffler un vent d’optimisme salutaire sur les marchés.
Que le rachat de dettes génère de la liquidité c’est bien, encore faut-il que celle-ci soit réinjectée dans l’économie réelle.
S’il n’est pas sûr que ce QE à l’européenne crée l’inflation tant espérée, il devrait en revanche être profitable à l’or qui joue parfaitement son rôle de refuge en période de dévalorisation monétaire et qui protège aussi bien les valeurs, le patrimoine, en période d’inflation comme en période de déflation. En règle générale, quand une monnaie est dévaluée par un Quantitative Easing, l’or, libellé dans cette devise, remonte. La baisse de l’euro est donc profitable au cours de l’or.
Pour approfondir le sujet des annonces de la BCE, nous avons sélectionné pour vous quelques articles qui devraient vous permettre de mieux comprendre le fonctionnement de l’assouplissement monétaire décidé par la BCE, ses enjeux et ses implications.
– Sur Le Figaro « BCE : le rachat de dettes d’État pour les nuls ».
– Sur Les Échos « QE, déflation… 10 questions pour comprendre les annonces de la BCE ».
– Sur Le Parisien « Le « QE » de la BCE, comment ça marche ? ».
– L’émission C Dans l’air sur le sujet. Malgré beaucoup d’efforts de la part des invités pour rester consensuels, beaucoup de questions restent en suspens.
– Sans oublier l’avis très éclairé et contrarien de Charles Sannat sur le sujet dans son édito du jour et qui, loin de tout évangélisme, évoque une « catastrophe annoncée ».