Mes chères contrariées, mes chers contrariens !
Comme je vous le disais hier, avant que les Grecs ne décident de cesser toutes leurs émissions radiophoniques et télévisuelles, je voulais vous parler d’or.
Mais avant de parler d’or, je ne peux pas m’empêcher de revenir sur cette histoire de télé grecque en panne. J’ai beaucoup aimé le traitement médiatique accordé à cette histoire. Il faut dire que nos médias, d’un coup, se sentent bigrement plus concernés par la crise grecque.
Une belle couverture médiatique de l’arrêt des télés grecques
Disons-le : que les enfants meurent de faim en Grèce ne fait pas vraiment la une des JT du soir, sans parler de l’augmentation de 80 % du nombre de séropositifs, de l’effondrement de l’espérance de vie ou des soins devenus tout bonnement impossibles pour le pékin grec moyen.
Mais là, vous vous rendez compte, c’est quand même la télé qui cesse d’émettre, et comment vivre sans télé ? À titre personnel, je pense que vivre sans télé devrait être considéré comme un immense prôôôôgrès car cela fait bien longtemps que la télé n’est plus un outil d’éducation (si tant est qu’elle l’ait été un jour) mais un outil de lobotomisation des masses à des fins politico-commerciales. Pour l’aspect politique, la télé sert à « fabriquer le consentement », comme l’explique si brillamment un homme comme Noam Chomsky. Pour l’aspect économique, les choses ont été parfaitement résumées par l’ancien Pédégé de TF1 qui avait expliqué le plus sérieusement du monde (mais il ne pensait pas être enregistré) que le « métier de TF1 c’était de vendre du temps de cerveau disponible à Coca-Cola »…
Alors oui, vive l’arrêt de la télé grecque et « pourvou qué ça doure » là-bas et qu’il se passe la même chose ici ! Pour plus d’informations, je vous renvoie à la conférence TV Lobotomie (comme je l’avais déjà fait) et à la semaine sans télé que je vous propose de transformer en « vivre sans télé » (ce qui veut dire vivre tout court). Pour les accrocs dont je fus et qui replonge régulièrement dans sa TV-dépendance dès qu’un dealer de télé passe à proximité, tentez l’expérience. Les résultats sont très surprenants et de façon très positive. J’arrête là mon prosélytisme pour vous parler d’or !
L’or est mou, c’est fatiguant !
Voilà mon sentiment sur les cours de l’or et je suppose que pour vous ce doit être relativement similaire.
Alors quelles sont les raisons fondamentales qui expliquent cette mollesse de notre métal jaune préféré ?
La réponse tient dans le triptyque « Récession, Déflation, Dépression ».
Les marchés n’anticipent pas à plusieurs années ni même à un an mais tout au plus à 6 mois. Au-delà de 6 mois, toutes les anticipations deviennent totalement hasardeuses.
Aux États-Unis
Après avoir monté sur des injections massives de liquidités, les marchés se rendent compte que la croissance américaine tant vantée tient du mythe plus que de la réalité.
Créations d’emplois dans l’industrie qui ne repartent pas et restent proches de leurs plus bas niveaux historiques.
Une reprise du crédit pour de mauvaises raisons (les Américains s’endettent pour payer leurs soins médicaux, c’est le deuxième motif d’emprunt aux USA, ou pour payer le remboursement de leur crédit étudiant…).
Selon une étude (américaine et sérieuse), à ce rythme, le taux de chômage US sera sous les 7 % pas avant… 2020, c’est-à-dire dans 7 ans. Ce n’est pas une reprise fulgurante.
Le déficit américain semble s’améliorer certes, mais c’est au prix d’une augmentation des impôts et d’une baisse des dépenses, ce qui a un effet récessif important sur l’économie pour le moment compensé en grande partie par les interventions de la FED, la Banque centrale américaine, qui imprime et imprime encore.
Le problème c’est que même la FED commence à vouloir essayer de limiter ses impressions monétaires pour ne pas continuer à alimenter des bulles financières sans fin, raison pour laquelle elle essaie tant bien que mal de piloter le plus finement l’arrêt de ces injections en essayant de ne pas provoquer un krach brutal.
Inutile de vous dire que, pour le moment, ce qui menace aux États-Unis, ce n’est pas l’inflation mais bien notre triptyque « Récession, Déflation, Dépression », et ce n’est pas bon pour l’or à court terme (mais « excellent » à moyen terme).
En Europe c’est la catastrophe économique !
En Europe, le triptyque « Récession, Déflation, Dépression » est carrément à l’œuvre. En Grèce bien évidemment, puisque comme vous avez pu vous en apercevoir ils en sont même à couper la télé publique tellement les caisses sont vides.
En Espagne ? N’en parlons pas, maintenant ce sont les Espagnols qui sont clandestins et sans papiers au Maroc dans une inversion des flux migratoires hallucinante et inattendue ! Tout s’effondre en Espagne. Tout. Le Portugal n’est pas mieux loti, l’Italie s’enfonce, la France rejoint progressivement les pays d’Europe du Sud dans la récession et la déflation avec une baisse de la consommation des ménages sans précédent depuis… 1949 !
Seule l’Europe du Nord, Allemagne en tête, résiste encore mais pour combien de temps ? L’Europe est donc en pleine récession, et là aussi, inutile de vous dire que les marchés n’anticipent pas vraiment le retour de l’inflation à court terme puisqu’en réalité elle est en train de se rapprocher très dangereusement de 0. Là encore, ce n’est pas bon pour l’or, en tout cas à court terme.
Les pays émergents
C’est-à-dire tous les autres, les BRICS et consorts subissent les effets du ralentissement de leurs deux principaux clients que sont l’Europe et les USA. Résultat : croissance en baisse en Chine, Russie qui annonce un plan de relance. Bref, les émergents ne peuvent pas prendre le relais de la croissance mondiale.
Là aussi, cela signifie qu’au niveau international il n’y a pas vraiment de craintes hyperinflationnistes.
Une mention spéciale pour le Japon
Le Japon est un cas particulier puisque l’excès de création monétaire de la Banque centrale nippone est tel que certains prémices d’hyperinflation se font sentir avec quelques augmentations de prix de l’ordre de 20 %, sans oublier une très forte dégradation de la balance commerciale déficitaire en raison d’un renchérissement de toutes les importations à commencer par les produits énergétiques.
Et là, les marchés anticipent plutôt une inflation forte et une baisse de la devise japonaise, le yen, puisque l’or exprimé en yen est justement sur ses plus hauts niveaux, ce qui confirme la théorie que pour le moment les marchés ne feront monter l’or que sur des craintes inflationnistes.
Les marchés ne prennent en compte que la moitié du risque !
Reprenons. Point d’inflation à l’horizon, (vous pouvez vous reporter à mon édito sur l’indéflation pour plus d’explications). Résultat : point d’appréciation de l’or et de l’argent (métal), avec un recul encore plus marqué pour l’argent qui amplifie très fortement les tendances à l’œuvre sur l’or en bon et en mauvais.
Donc pour les marchés, ce n’est pas un risque crédible à 6 mois, par conséquent l’or reste désespérément scotché sur des niveaux 30 % plus bas que ses plus hauts.
Mais les marchés ont tort car ils omettent un risque essentiel qu’est celui de l’insolvabilité des État, de l’explosion de l’euro ou encore du choc de confiance… qui pourrait vite se transformer en choc de défiance, sans oublier non plus le risque systémique bancaire, puisque les banques sont encore plus fragiles qu’hier, puisque tout continue comme avant mais en pire.
Le problème avec ses éléments, c’est que personne ne veut les pricer à 6 mois, les anticiper maintenant. Tous les acteurs jouent une partition d’autiste, orchestre sur un Titanic en train de sombrer et faisant comme si de rien n’était. Courage et honneur pour les uns sur le vrai Titanic, déni pour les autres sur le Titanic financier. Des autruches. Rien de plus.
Pour le moment, c’est cette politique de l’autruche qui l’emporte mais déjà ce consensus se fissure, et l’on voit bien pointer à l’horizon quelques sombres nuages annonçant une nouvelle tempête. Il faudra du temps encore pour admettre que la France est insolvable et insauvable. Pour l’Italie, l’Espagne, le Portugal, il en est de même.
Mais tôt ou tard, les marchés seront obligés d’anticiper et de prendre en compte ces risques. Dès lors, le potentiel de l’or et de l’argent sera énorme et nous connaîtrons sans doute des performances de plus de 20 ou 30 % par jour !
Posez-vous cette question : quel prix êtes-vous prêts à payer une pièce d’or ou d’argent si vous avez la certitude que nous allons tous être chyprés d’ici quelques semaines ou quelques jours ?
Sans doute un prix proche du milliardaire en train de mourir de soif dans le désert et à qui on propose une planche de salut sous la forme d’une bouteille 1,5 l d’Évian et fraîche !! Combien pour cette bouteille ? L’acheteur paiera le prix que fixera le vendeur dans la limite de sa fortune.
Charles SANNAT