Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
Jacques Attali est décidemment particulièrement en forme ces dernières semaines. Alors qu’il nous avait gratifiés d’un excellent papier que j’avais repris dans les colonnes du Contrarien Matin et intitulé « Débrouillez-vous », le voilà qui poursuit dans sa veine contrarienne en nous prédisant une énorme crise en 2015 dans son dernier article dont le titre est « La prochaine crise : en 2015 ? ».
Jacques Attali y développe un raisonnement l’amenant à étayer pourquoi il pense que l’on arrive à la fin d’un cycle et donc au seuil d’une nouvelle crise qui ne sera jamais que le prolongement de celle que nous n’avons pas quitté depuis l’épisode paroxystique de 2007/2008.
Il explique surtout ce qu’il faudrait faire pour éviter cette nouvelle crise, et là, permettez-moi d’être dubitatif d’ailleurs sur deux choses. La première étant que même les éléments avancés ne me semblent pas de nature à nous permettre d’éviter ce qui va nous déferler dessus dans la mesure où cela ne répond pas ni à la raréfaction du travail ni à la raréfaction des ressources naturelles, et la deuxième c’est que quand bien même Jacques Attali aurait raison (et moi tort), il est fort à parier que rien de ce qu’il n’avance ne sera mis en place pour la simple et bonne raison que notre Monsieur 3 % (voir le dernier sondage du Figaro à ce sujet) qui siège à l’Élysée n’a toujours pas la moindre conscience de ce à quoi il est confronté et n’a, pour ainsi dire, strictement rien compris à la situation économique de notre pays. Je vous passe également le manque cruel de courage dont il a fait preuve jusqu’à présent et je le vois assez mal mettre encore plus de flexibilité dans le marché du travail alors que dès 2015 nous aurons de facto la suppression du régime (ultra-flexible) des auto-entrepreneurs aligné sur celui de la micro-entreprise avec quelques menus contraintes en plus…
Je vois également mal notre nodocéphale élyséen se changer brutalement en De Gaulle ou en Churchill capable de changer en totalité les modalités de fonctionnement de notre société. Notre situation est fondamentalement au-delà de toute notion de réforme. Encore une fois, nous vivons sur des structures héritées de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il y a 70 ans ! Nous étions en plein exode rural, nous avions besoin de bras pour remplir nos usines d’ouvriers, la mondialisation n’existait pas, pas plus que le transport aérien de masse ou encore les TGV, je ne parle même pas des réseaux informatiques, de la dématérialisation ou de l’informatique et de la révolution robotique qui nous arrive dessus !
Bref, il y a peu de chances que cette « nouvelle » crise – car n’en doutez pas, on vous la « vendra » comme étant « nouvelle » – puisse être évitée, ce qui nous amène donc à ses conséquences potentielles.
Les conséquences de la future crise de 2015
En gros, pour Attali (et je pense exactement la même chose), nous avons atteint des niveaux d’endettement jamais vu en temps de paix dans les pays dits « développés ». Lors de la prochaine crise, il faudra bien passer à la caisse et payer les pots cassés, cela ne pourra se faire que par la ruine des épargnants puisqu’en réalité, ceux qui ont financé les dettes sont bien les épargnants finaux à travers leurs différents supports d’épargne. Effacer les dettes ce n’est pas uniquement « punir » les méchantes banques (qui d’ailleurs le méritent), effacer les dettes c’est surtout effacer l’épargne des gens, une épargne sur laquelle ils comptaient pour tout un tas de choses et de projets.
Jacques Attali vous met en garde contre l’affaire chypriote qui préfigure les « bail-in », c’est-à-dire les effacements de dettes, à venir ainsi que sur la nouvelle législation européenne (encore peu connue selon lui ce qui est vrai pour le « vulgus pecum » mais nettement moins pour le contrarien moyen parfaitement informé) qui donne tout le cadre juridique à nos autorités politiques et monétaires pour nous ruiner au-delà de 100 000 euros, ce qui ne veut pas dire, soit dit en passant, que nous ne le serons pas sous cette fameuse barre des 100 000 euros. Tout dépendra de l’ampleur de la future catastrophe.
Enfin, Jacques Attali évoque à juste titre bien que « trop » pudiquement le véritable risque des pays européens qui est un risque de balkanisation et de guerres civiles.
« D’autre part parce que, à la différence des crises précédentes, le monde est loin d’être en paix ; les guerres et les menaces de guerres, civiles ou entre nations, se multiplient rendant les investisseurs plus frileux encore. »
Traduisons clairement ce que sous-entend ici Jacques Attali. Il faudrait être sourd et aveugle ou un « fasciste » du politiquement correct pour ne pas se rendre compte des fractures qui cisaillent de nombreux pays européens et ces fractures, que cela plaise ou non, sont d’ordre ethnique et religieux sur fond de misère sociale compensée par des aides massives afin de maintenir un semblant d’ordre social. Tout cela peut se déchirer en un clin d’œil en cas de crise grave menant par exemple à l’insolvabilité de l’État français et à son incapacité par exemple à verser les prestations sociales tant attendues dans certains quartiers.
Cette radicalisation de part et d’autre dans une Europe multiculturelle en échec patent se matérialise évidement par le vote massif Front National en France lors des dernières élections européennes. Certains s’en réjouiront, d’autres (dont beaucoup ne sont pas allés voter car ils avaient forcément autre chose de beaucoup plus important à faire) en « pleurent ».
Peu importe tout cela car ce sera balayé par la crise et je vous laisse imaginer l’état de notre pays si demain les « gamelles » étaient vides. Il est fort probable que de nombreux pays européens, dont le nôtre, connaîtraient des situations de violences extrêmes confinant à une forme de guerre civile avec des populations urbaines absolument pas en mesure de s’autosuffire au moins en partie et dépendant en totalité soit des modes de transports et d’approvisionnements soit des aides sociales soit des deux… Si jamais toute cette belle mécanique venait à se gripper, tout ce qui est actuellement contenu par des digues plus ou moins fragiles se déverserait et l’état réel de notre pays apparaîtra crûment à tous, et croyez-moi ce ne sera pas beau à voir.
Alors comment vous préparer ?
Voilà la question que nous nous posons tous et à laquelle chacun, dans notre configuration personnelle et « sous contrainte », nous essayons de répondre.
Lorsque que l’on parle de se protéger de faillite bancaire et d’effacement de l’épargne, il n’y a pas 36 solutions. Il faut évidemment débancariser au maximum et avoir son argent en dehors des griffes de l’État. Il faut donc détenir des actifs tangibles comme l’or, l’argent et même dans une certaine mesure des billets de banque (les retraits étaient très fortement limités à Chypre).
Lorsque l’on parle de possibles ou d’éventuelles guerres civiles, il faut se situer dans des zones rurales et non-urbaines. Cela est également valable pour l’autonomie d’une famille toujours plus facile à la campagne qu’en ville. Un simple potager et un poulailler vous aideront grandement à améliorer l’ordinaire.
Nous avons vécu l’exode rural puisque les villes avaient besoin de bras pour faire tourner les usines. Les progrès technologiques étant passés par là, l’avenir sera rural et nous devrions vivre comme la Grèce qui est précurseur sur ce point-là, un véritable exode urbain.
Quittez les villes tant que vous le pouvez car après il se pourrait qu’il soit trop tard et je vous renvoie à l’article précédent du même Jacques Attali où il vous appelait à vous « débrouiller » ! Oui, n’attendez plus de savoir ce que l’État pourra faire pour vous, car l’État est devenu le problème et ne nous apportera plus aucune solution.
Le temps des demi-mesures est révolu. Il y aura à l’avenir deux types de gens. Ceux qui auront su prendre à temps les bonnes décisions et changer leur postulat de vie, ceux qui en un mot auront décidé de se débrouiller et tous les autres.
Je vous souhaite à toutes et tous bonne chance et beaucoup de courage dans vos prises de décisions car vous allez devoir décider aujourd’hui, sur un risque hypothétique pour demain, de changer de vie tout de suite ! Évidemment, c’est tout sauf facile ou évident surtout lorsque cela engage une famille, un conjoint et des enfants et que vos choix iront complètement à l’encontre du consensus mou qui nous entoure.
En cette veille du 70e anniversaire du débarquement allié en Normandie, je me souviens de ma grand-mère paternelle qui avait été prise pour une grande folle en faisant rentrer 600 boîtes de pâtés début 39. Je me souviens de ma grand-mère maternelle qui avait demandé sa mutation en tant qu’institutrice dans un bled de campagne de 250 habitants car elle avait 3 gamines en bas-âge à nourrir. Je me souviens de ce que l’on m’a raconté sur la réaction de son inspecteur d’académie qui l’a longuement regardée et lui a trouvé l’un des villages les plus reculés de France en lui disant le plus sérieusement du monde : « Si cela devait mal se passer, là-bas au moins vous ne devriez pas voir trop de boches. »
Aujourd’hui, la probabilité pour que les choses se passent très mal augmente de jour en jour. Je laisse donc la parole à Jacques Attali lui-même en relayant ici son dernier article que je vous invite à lire là encore avec attention autant pour ce qu’il dit, que pour ce qu’il suggère ou encore pour ce qu’il ne dit pas, tant les propos d’Attali, un homme brillant, peuvent et doivent se lire sur ces trois niveaux.
« La prochaine crise : en 2015 ? » par Jacques Attali
« L’avenir pourrait nous rappeler très bientôt que, depuis plus de vingt-cinq ans, une grande crise économique et financière s’est déclenchée tous les sept ans :
En octobre 1987, le Dow Jones perd 22,6 % en une journée ; c’est le premier krach de l’ère informatique. La crise s’étend vite ; le 2 novembre 1987, Time Magazine fait sa couverture sur : « La panique s’empare du monde ». La FED réussit à calmer le jeu.
En décembre 1994, alors qu’une euphorie des entreprises fondées sur Internet enfle dans la Silicon Valley, l’Orange County, tout à côté, spécule sur les marchés financiers, et se déclare en faillite ; un peu plus tard, une brutale et brève crise monétaire et financière asiatique se propage en Russie et au Brésil puis aux États-Unis. La FED réussit là encore à maîtriser la situation.
Dès avril 2001, la bulle Internet, qui s’est formée depuis cinq ans, explose ; l’indice Dow Jones perd 7,3 % en une journée. Encore une fois, la FED calme le jeu en inondant le pays de liquidités, qui se transformeront en crédits immobiliers.
À l’été 2008, l’explosion d’une bulle sur la titrisation des crédits hypothécaires déclenche une nouvelle crise, cette fois véritablement planétaire. Les banques centrales et autres prêteurs permettent une nouvelle fois, aux États et aux entreprises, de s’endetter à bas taux, sans pour autant obtenir qu’ils investissent et se réforment.
Nous approchons de la fin d’une nouvelle période de sept ans. Des bulles se sont partout reformées. Et si la croissance n’est pas au rendez-vous, ou si une crise géopolitique vient l’interrompre (en Ukraine, en Chine, au Brésil, ou ailleurs) ces bulles exploseront ; les taux d’intérêt monteront ; le financement des emprunts deviendra très difficile ; la mondialisation fera le reste et les marchés, qui ne disent plus la valeur du risque, seront une nouvelle fois pris de panique.
En toute logique, cette crise devrait se déclencher en 2015. Si on ne s’y prépare pas, elle sera pire que les précédentes, en particulier en Europe. Pour deux raisons : d’une part, parce que presque tous les jokers ont été utilisés – nul ne pourra s’endetter d’avantage – et la BCE, même en utilisant tous les moyens à sa disposition, y compris les plus hétérodoxes, ne pourra pratiquement rien. D’autre part parce que, à la différence des crises précédentes, le monde est loin d’être en paix ; les guerres et les menaces de guerres, civiles ou entre nations, se multiplient rendant les investisseurs plus frileux encore.
Il n’y aura alors plus d’autres solutions que de payer la note ; en clair, de rembourser les dettes ou de les annuler. Et cela ne pourra être fait, en particulier en Europe, qu’en mettant à contribution les détenteurs finaux des créances, c’est-à-dire les épargnants, qui verront leur épargne spoliée, non par l’inflation, mais par une ponction sur leurs comptes, comme cela fut le cas à Chypre (ce que permettent explicitement les accords récents sur l’Union Bancaire, dits de « bail in », même si c’est encore peu connu).
Il est encore temps de s’en rendre compte. Et d’agir. En particulier en Europe, en recréant les moyens d’une croissance saine et durable ; cela ne passe que par quatre moyens, qu’il faut d’urgence utiliser simultanément :
Une action pour faire baisser significativement l’euro relativement au dollar, qui suppose que les ministres des Finances de la zone euro la demande enfin explicitement à la Banque Centrale.
Une relance de l’investissement, qui ne peut venir que par de grands projets publics, en particulier en matière de réseaux d’énergie et de télécommunication, financés par des eurobonds, ou par la BEI, ou par les diverses Caisses des Dépôts nationales. Encore faudrait-il que ces institutions cessent de s’accrocher à leur sacrosaint triple A, qui les paralyse.
Une accélération des réformes de structure dans l’Europe du Sud, en particulier en France, libérant les forces créatrices, comme l’ont fait, chacun à leur façon, avec le succès que l’on sait, les Allemands, les Anglais, les Suédois, et les Canadiens.
La recherche attentive de la paix, en particulier entre les Européens et leurs voisins de l’Est et du Sud.
Si tout cela n’est pas très vite entrepris, avec courage et ténacité, en particulier par les pays européens enfin rassemblés, bien des orages éclateront. Dans les 18 prochains mois.
Personne ne pourra prétendre qu’il n’était pas prévenu. »
Préparez-vous et restez à l’écoute.
À demain… si vous le voulez bien !!
Charles SANNAT
2 commentaires sur “« Nous avons au mieux 18 mois devant nous »”
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