C’est un article de Virginie Moriaux dans Trend.be qui nous parle d’un nouvel ouvrage, un livre collectif sur l’euro et ses conséquences dramatiques. La parole commence enfin à se libérer sur la monnaie unique et l’on peut sur la pointe des pieds parler de ses défauts structurels délétères sans pour autant passer pour un horrible individu fasciste et d’extrême droite ! Il était temps !!
Charles SANNAT
« Cela aurait pu être un poisson d’avril et pourtant… ce n’en est pas un. Avec un livre à paraître demain, mercredi 2 avril, quatre journalistes économiques unissent leur voix (et leur plume) pour affirmer haut et fort que l’euro est mort et que pour sauver l’Europe, il faut faire marche arrière et revenir à nos bonnes vieilles monnaies nationales.
L’Europe va mieux, économiquement parlant, la zone euro retrouve un petit sentier vers la croissance et pourtant… il est à nouveau question de « sortir de l’euro », autrement dit d’abandonner la monnaie unique actuelle au profit des anciennes devises. Car pour les quatre auteurs du livre Casser l’euro, l’euro, tel que nous le connaissons actuellement, est « cliniquement mort ».
« Plus d’une décennie après le lancement de l’euro, la convergence tant attendue des économies n’a pas eu lieu, les modèles sociaux ont été détricotés et la spéculation s’est déchaînée », écrivent ces journalistes.
Et voici l’énonciation des principaux maux qu’ils reprochent à l’euro d’aujourd’hui :
– d’être un euro « made in Germany » car l’Allemagne a un droit d’accès sans restriction tarifaire à des marchés voisins et un taux de change compétitif ;
– l’euro actuel est destructeur de croissance : ils illustrent leurs propos dans leur livre avec un historique des performances ;
– c’est une machine à fabriquer de l’hétérogénéité à cause du dopage de la demande intérieure au Sud et un choc de compétitivité au Nord ;
– notre euro est un instrument de dumping social : étant donné qu’on ne peut pas le dévaluer, les seuls recours existants sont la baisse de la fiscalité ou la baisse des salaires ;
– finalement ils qualifient l’euro de « cheval de Troie de la rigueur ».
La BCE en prend aussi pour son grade vu qu’elle est jugée trop « dogmatique et déstabilisante » par les auteurs de ce livre. Un avis partagé par d’autres noms de l’économie tels que Jacques Sapir, directeur d’études à l’EHESS, et Frédéric Lordon, directeur de recherche au CNRS.
L’euro est mort, vive l’euro
Mais même si l’euro est mort pour ces journalistes économiques, ils ne l’enterrent pas tout de suite pour autant.
Leur solution pour sortir de l’euro est originale et pour le moins intéressante : l’euro ne serait plus la monnaie unique de l’Europe mais une monnaie commune. Bref, ils proposent de revenir à un système monétaire européen (SME), qui relierait entre elles toutes les monnaies nationales.
Mais un SME version « moderne », c’est-à-dire avec interdiction de ventes à découvert et obligation pour les banques de payer une taxe de sortie de leurs capitaux.
Oui mais pour revenir aux monnaies nationales, il faut que celles-ci aient une valeur, or comment déterminer cette dernière ? Pour eux, ces monnaies seraient définies par rapport à l’euro, suivant la règle du « un pour un » qui consiste à caler, temporairement, l’unité de chaque devise nationale sur l’euro.
De toute manière, il est impossible de supprimer de manière définitive l’euro du jour au lendemain, il faut que cette monnaie subsiste face au dollar comme monnaie d’échange internationale.
Bref, un livre polémique qui rassurera certains qui partagent l’idée d’une sortie de l’euro, qui agacera les autres qui trouveront que les arguments développés sont contestables et qui les contesteront.
« Sortir de l’euro peut être tentant », conclut Guillaume de Calignon, journaliste des Échos. Mais « la sortie de l’euro serait un saut dans l’inconnu, une réaction en chaîne d’événements qui risque de tétaniser les agents économiques, ménages comme entreprises. Sans compter les réactions politiques de nos voisins. » En effet, si nous pouvons avoir une idée plus ou moins précise de ce que nous perdrons à sortir de l’euro, nous n’avons qu’une idée très floue de ce qu’il y aurait à y gagner.
Casser l’€uro – Pour sauver l’Europe, avril 2014, éditions Les Liens qui Libèrent. 19 euros.
Co-écrit par Franck Dedieu, rédacteur en chef adjoint de L’Expansion,
Benjamin Masse-Stamberger, grand reporter à L’Express,
Béatrice Mathieu, rédactrice en chef adjointe à L’Expansion,
Laura Raim, journaliste indépendante qui collabore à Regards et au Monde Diplomatique.
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